En 2009, le Centre Pompidou a organisé une exposition autour de la peinture de Pierre Soulages. Celle-ci m’a fait forte impression, en particulier le travail développé par l’artiste à partir des années 1980. J’ai tout de suite pensé que des liens solides pouvaient s’établir entre sa peinture, et particulièrement son concept « d’outrenoir », et l’univers sonore. La composition de La lumière du noir s’inscrit dans ce contexte : elle emprunte à l’imaginaire de Soulages en même temps qu’elle lui rend hommage. La pièce s’articule autour de l’idée de faire surgir la lumière de l’obscurité. Ce paradoxe manifeste trouve chez Soulages une parfaite résolution : la lumière émerge du noir et se transmute en se reflétant sur la texture du tableau, suivant la manière dont la peinture est appliquée sur sa surface. De la même façon, La lumière du noir vise à transmuter le matériau musical, filtré par le traitement des textures ; de situations de pénombre totale ou d’opacité, le discours évolue chaque fois vers un état plus lumineux ou transparent. Chez Soulages, le noir devient une source de lumière ambiante qui crée son propre espace ; dans ma composition, le matériau sonore – parfois absorbé, parfois reflété par un autre matériau – crée lui aussi un espace topologique distinct. Chez Soulages, le noir est dépouillé de ses possibles significations symboliques, tout en acquérant un relief en soi, en tant qu’objet pictural. C’est une couleur qui transcende la notion même, spécifique, de « couleur » pour se faire matière. Dans La lumière du noir, le son est également matière musicale en soi, un objet saillant qui naît de la spécificité des instruments de l’ensemble.
Alberto Posadas.
Traduit de l'espagnol par José-Luis Besada.