Participants
  • Thomas Saboga (conférencier)

Dans le cadre d’une recherche doctorale sur la création d’un style musical qui articule les univers de la musique savante et populaire par le compositeur argentin Astor Piazzolla, nous proposons pour cette communication un regard sur le morceau Muerte del ángel. Présent dans l’album « Nuestro tiempo », sorti en 1962 et premier registre phonographique de son quintette « Nuevo Tango », ce moment de sa carrière est de spéciale signification pour l’aboutissement de son style musical, comme nous l’ont dévoilé nos analyses auditives entreprises tout au long de notre recherche. Nous cherchons à comprendre, de façon plus spécifique dans ce style abouti, quels seraient les rapports engendrés par le compositeur entre la musique populaire et savante – élément fondamental ainsi que différentiel de son œuvre – à partir desquels le tango argentin peut se mêler sans éclectisme à des procédés de fugue de la musique baroque, à des pratiques du jazz, ou bien alors à des techniques d’écriture de la musique savante moderne et contemporaine. Nos interrogations démarreront sur la présence, pour se développer ensuite sur la fonction que ces divers procédés auraient dans ses compositions et arrangements. Quelles sont les conséquences esthétiques de métisser ces divers éléments ? Pourquoi certains procédés, comme l’écriture de la fugue, y sont-ils incorporés? Pourquoi l’utilisation usuelle de ceux-ci est-elle changée ?

Nous considérerons dans cette communication les rapports historiques du compositeur avec la musique baroque, notamment celle de Bach, présents dans ses déclarations. Les études académiques antérieures sur la musique de l’Argentin qui ont porté sur ces rapports, comme celles de López et de Goldenberg, et qui nous aident à cerner la fonction de la fugue dans sa musique aussi bien que les rapports entre tango et fugue qui s’y cachent, seront aussi prises en considération dans ce débat. Mais les résultats présentés se référeront principalement aux rapports entre la musique de Piazzolla et la fugue, très pertinents pour penser à ces questions, et significative- ment présents dans la composition Muerte del ángel. À partir des procédures d’écriture de fugue, qui ont comme caractéristique d’être très normées, nous pouvons par contraste avec son écriture suivre une intéressante voie de recherche: comme il nous est possible de savoir comment le compositeur aurait dû faire selon la tradition académique, il nous est aussi permis d’appréhender les conséquences esthétiques de cette autre réalisation choisie, et conséquemment de cerner de plus près les questions soulevées par cette recherche. Pour cela, nous avons utilisé le traité de fugue de Gedalge comme une possible référence de l’écriture de fugue académique apprise par le compositeur, après considérer les traces de ses études avec Nadia Boulanger dans notre recherche historique.

Musique savante/musiques actuelles : articulations JAM14 : journées d'analyse musicale 2014 de la Sfam : journée 2

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