LâhĂ©ritage est clairement revendiquĂ© par Schoenberg lui-mĂȘme : Bach, Mozart, Beethoven, Brahms et Wagner, une tradition de lâĂ©criture profondĂ©ment marquĂ©e par le sens de la dĂ©rivation thĂ©matique, la maĂźtrise dans la manipulation de sĂ©quences asymĂ©triques et celle des transitions. Le legs immĂ©diat â Brahms et Wagner, apparemment contradictoires â sâimpose dâemblĂ©e : le premier pour lâagencement des Ă©quilibres et la concentration thĂ©matique ; le second pour la cohĂ©rence dans la prolifĂ©ration perpĂ©tuelle. Brahms rĂ©ussit lâenchĂąssement de thĂšmes essentiellement mĂ©lodiques dans des structures formelles symĂ©triques (sonate, scherzoâŠ) tandis que Wagner libĂšre la mĂ©lodie dans la continuitĂ© et dans lâirrĂ©versibilitĂ©. La premiĂšre Ćuvre purement instrumentale intĂ©grĂ©e au catalogue, La Nuit transfigurĂ©e op. 4 (1899) pour sextuor Ă cordes, regarde Ă la fois vers lâun â dĂ©ploiement de mĂ©lodies hautement Ă©laborĂ©es ayant fonction thĂ©matique â et vers lâautre par le choix de la forme narrative ininterrompue, cette tendance sâamplifiant aussitĂŽt dans lâunique poĂšme symphonique PellĂ©as et MĂ©lisande, op. 5 (1903).
La totale fidĂ©litĂ© Ă la tradition immĂ©diate, qui dĂ©marque radicalement Schoenberg de ses principaux contemporains (Debussy, Stravinsky) rĂ©pond Ă une puissante conscience de la nĂ©cessitĂ© historique dans lâĂ©volution de lâart ; lâhumour de la fameuse rĂ©plique selon laquelle personne nâayant voulu ĂȘtre Schoenberg, il fallait donc que lui-mĂȘme le fĂ»t 1, rĂ©sume toute lâorientation esthĂ©tique Ă venir : tirer les consĂ©quences (pour reprendre lâexpression cruciale chez Adorno) de lâĂ©tat auquel est parvenue lâĂ©volution historique du matĂ©riau (harmonie, mĂ©lodie et forme) et justifier ainsi, inlassablement, les avancĂ©es extrĂȘmes des premiĂšres annĂ©es puis le choix problĂ©matique de lâordre sĂ©riel pour mesurer enfin lâimpact dâune conviction religieuse dâautant plus puissante que sâest affermie celle dâavoir eu raison devant lâhistoire.
Dissolution et fulgurance : 1900-1915
La spĂ©cificitĂ© de lâĂ©criture sâaffirme dĂšs les premiers Lieder op.1 et 2 (1900) par le rapport complexe entre une phrasĂ©ologie indiscutablement tonale (articulations, points dâappui, polaritĂ©s fortes) et une invention mĂ©lodique singuliĂšrement riche par la nature mĂȘme des intervalles ; si Wolf (dont les derniers lieder remontent Ă 1897) et mĂȘme Brahms avaient dĂ©jĂ largement engagĂ© la modernitĂ© sur cette voie, Schoenberg accentue la disjonction par des parcours harmoniques extrĂȘmement incertains (rĂ©solutions harmoniques ambiguĂ«s) et par un recul sensible de la rĂ©pĂ©tition immĂ©diate dâune idĂ©e, dĂ©jĂ en elle-mĂȘme difficile Ă assimiler instantanĂ©ment. Câest sur ces critĂšres quâAlban Berg expliquera plus tard pourquoi, mĂȘme dans une perspective tonale (en lâoccurrence le Premier Quatuor), « la musique de Schoenberg est si difficile Ă comprendre 2 » ; car Ă la richesse de lâidĂ©e, et de ses dĂ©ploiements dâemblĂ©e elliptiques sâajoute trĂšs vite la tendance Ă surcharger lâinformation par la simultanĂ©itĂ© dâĂ©lĂ©ments dâĂ©gale densitĂ©, rompant avec lâidĂ©e de hiĂ©rarchie thĂšme/mĂ©lodie â accompagnement ; le Premier Quatuor op. 7 et la PremiĂšre Symphonie de chambre op. 9 (1905-1906) rĂ©sument de façon exemplaire cette densitĂ© qui sâimposera dĂ©finitivement comme donnĂ©e premiĂšre du style.
Ă travers la conquĂȘte de la durĂ©e â ces deux Ćuvres durent respectivement vingt-cinq et quarante-cinq minutes sans rĂ©elle interruption, la forme en un mouvement y agglomĂ©rant les quatre traditionnelles parties â Schoenberg dĂ©voile toute lâimportance quâil attribue Ă lâarticulation thĂ©matique et quâil continuera toujours de revendiquer. En 1934 encore : « jâai assez tendance Ă croire quâil est moins dangereux de supprimer la logique et lâunitĂ© dans lâharmonie que dans le matĂ©riel thĂ©matique, les motifs et la pensĂ©e musicale 3 ».
La dissolution sera donc dâabord celle du sentiment tonal, tandis que, simultanĂ©ment, se renforce encore la soliditĂ© du travail motivique : DeuxiĂšme Quatuor (1908) bĂąti sur un thĂšme cyclique avec un troisiĂšme mouvement qui, au seuil mĂȘme de lâinconnu, multiplie les rĂ©miniscences des prĂ©cĂ©dents, PiĂšces pour piano op. 11 n° 1 et 2 « ultrathĂ©matiques » (Boulez) PiĂšces pour orchestre op. 16 n° 1 et 2 fortement arc-boutĂ©es sur des idĂ©es extrĂȘmement prĂ©gnantes⊠Le souvenir des derniers KlavierstĂŒcke de Brahms (op. 116 Ă op. 119) est ici indiscutablement prĂ©sent. Mais le recul rapide de toute forme de substrat thĂ©matique (op. 11 n° 3, op. 16 n° 4 et 5) oblige la vitesse dâexĂ©cution des idĂ©es Ă devenir pure fulgurance : seuls demeurent alorsquelques rĂ©flexes dâĂ©criture acquis comme les mouvements conjoints des lignes extrĂȘmes et la quasi immobilitĂ© des voix mĂ©dianes â rĂ©fĂ©rence trĂšs oblique au sacro-saint contrepoint⊠â emboĂźtements chromatiques dâaccords tendus (Erwartung op. 17 en particulier).Bref, non seulement la mĂ©moire de lâauditeur est perpĂ©tuellement dĂ©fiĂ©e par la suppression de toute rĂ©pĂ©tition identifiable comme telle, mais câest lâhistoire elle-mĂȘme qui, pour un temps, est volontairement oubliĂ©e ; du reste, le finale du DeuxiĂšme Quatuor, « EntrĂŒckung » (dĂ©tachement) 4 marquait dĂ©jĂ le pas avant les chocs Ă venir.
Les Ćuvres athĂ©matiques sont marquĂ©es par le spectaculaire dĂ©placement de lâĂ©nergie vers lâĂ©laboration du timbre, la troisiĂšme des PiĂšces op.16restant emblĂ©matique de cette mutation qui voit naĂźtre la technique de la mĂ©lodie de timbres (Klangfarbenmelodie) : non plus une mĂ©lodie â diffĂ©rents sons consĂ©cutifs â mais un seul son (ou groupe de sons) jouĂ© successivement par diffĂ©rents instruments. Si Webern relaie trĂšs vite cette pratique, la primautĂ© nouvelle du timbre produit surtout des textures inouĂŻes focalisĂ©es sur ces innombrables « taches sonores » (Adorno) qui constituent une deuxiĂšme dimension ineffaçable du style jusquâĂ la fin.
Il y a avant tout dans cette radicale volte-face de lâĂ©criture (sur laquelle Schoenberg reviendra lui-mĂȘme Ă la fin de son TraitĂ© dâHarmonie) quelque chose de la grande crise du moi que les termes de la lettre Ă Kandinsky (24/I/1911) rĂ©sument drastiquement : « Ă©limination de la volontĂ© consciente dans lâart [âŠ] Ă©laboration inconsciente de la forme (âŠ) âforme = manifestation de la formeâ 5 »⊠à la conduite rationnelle et continue des idĂ©es se substituent le bond, le saut, la disjonction totale et fulgurante des causalitĂ©s immĂ©diates (rĂ©solutions harmoniques cryptĂ©es, articulations motiviques brisĂ©es). Les PiĂšces op. 16 et le monodrame Erwartung (Attente), en particulier, multiplient ces fractures ; mais elles les rĂ©duisent aussi par le recours quasi systĂ©matique Ă lâostinato, sorte de flux de la conscience devenu seul capable de relier entre eux des Ă©vĂ©nements disjoints.Toutes ces Ćuvres sont aussi marquĂ©es par un profond sentiment de solitude qui explique la citation voire lâautocitation. Wagner reste prĂ©sent (Tristan et Parsifal surtout), tandis quâau moment oĂč le texte dâErwartung croise les premiers mots du Lied op. 6 n° 6 de 1901 (au bord du chemin), lâĂ©vocation de lâisolement devant la foule qui passe sâexprime par le mĂȘme geste (ligne vocale du lied aux bois, basse du piano Ă la voix). De cette Ă©preuve personnelle jaillira une Ćuvre forte, Die GlĂŒckliche Hand (La main heureuse) op. 18 (1910-1913) dont le hĂ©ros, qui possĂšde un savoir suprĂȘme que la masse ignore et mĂ©prise, reste absolument seul.
Si les Ćuvres de 1911-1915 ne quittent pas cet univers, elles tĂ©moignent nĂ©anmoins dâune sensible tendance Ă la clarification par la briĂšvetĂ© et par le traitement plus structurĂ© des textes poĂ©tiques. Le retentissant Pierrot lunaire op. 21de 1912, inexplicablement tenu pour le paradigme de la rĂ©volution schoenbergienne, incarne paradoxalement cette esthĂ©tique. Nouveau par sa diction elle-mĂȘme â ce fameux Sprechgesang (chantĂ©-parlĂ©) qui ne vient pas des cabarets berlinois dans lesquels il nây avait pas de diseuses, mais vise plutĂŽt une certaine thĂ©Ăątralisation de lâĂ©criture â le Pierrot Lunaire Ă©voque la bifurcation de Stravinsky aussitĂŽt aprĂšs Le Sacre du Printemps ; Schoenberg assume la sienne par le retour au strict contrepoint Ă deux voix (septiĂšme piĂšce) aux techniques canoniques Ă©prouvĂ©es (passacaille de la huitiĂšme piĂšce) avec une certaine nostalgie des temps anciens (vingt et uniĂšme piĂšce)âŠ
Mais lâultime Ă©tape nous livre une clĂ© pour saisir la grande mutation Ă venir. Le premier et le dernier des Quatre Lieder op. 22 (1913 et 1916) replongent dans la thĂ©matique de la solitude et du pressentiment qui parcourait la fin du DeuxiĂšme Quatuor de 1908. A lâangoisse face Ă lâinĂ©luctable affrontement de la crise de la tonalitĂ© rĂ©pond ici lâinquiĂ©tude devant la lourde dĂ©cision que sera lâadoption de la technique de composition avec douze sons 6.
La nĂ©cessitĂ© et lâarbitraire
En relevant, Ă propos de la mĂ©lodie dodĂ©caphonique, que « chacune de ses constitutions prĂ©sente quelque chose dâarbitraire 7 », Adorno met le doigt avec justesse sur le fait que la composition avec douze sons, en devenant un nouveau systĂšme, introduit une logique extĂ©rieure au matĂ©riau lui-mĂȘme (codification de la non-rĂ©pĂ©tition dâun son avant que les onze autres nâaient Ă©tĂ© Ă©noncĂ©s et remise en vigueur des procĂ©dĂ©s rhĂ©toriques anciens : mouvement droit â de gauche Ă droite â rĂ©trogradĂ©, miroir, miroir rĂ©trogradĂ©âŠ). Dans les musiques expressionnistes des annĂ©es 1909 en effet, les douze sons Ă©taient implicitement tous agrĂ©gĂ©s Ă chaque instant, ne fĂ»t-ce que pour matĂ©rialiser le rejet de toute rĂ©pĂ©tition devenu inĂ©luctable ; mais la logique des emboĂźtements restait interne, condition de survie au dĂ©rĂšglement total. En introduisant un ordre extĂ©rieur, Schoenberg vise Ă en finir avec cet Ă©tat. Mais il dĂ©montre aussitĂŽt la relativitĂ© de ce geste : la musette de la Suite pour piano op. 25 (1925) est construite sur une pĂ©dale de sol⊠La rĂ©pĂ©tition prend dĂ©jĂ sa revanche sur lâindiffĂ©rence dâun art nouveau qui « nâa pas de motivation thĂ©orique propre ».
Câest que, plus profondĂ©ment, « la composition avec douze sons est nĂ©e dâune nĂ©cessité », Schoenberg prĂ©cisant dâemblĂ©e que lâon pourra, avec elle, composer de façon absolument classique puisquâelle est « justifiĂ©e par son dĂ©veloppement historique ». Pure « manifestation dâune rĂ©action, Ă un Ă©tat de fait [elle] en adopte les lois comme point de dĂ©part de sa contestation ». Toutes ces formules, rĂ©digĂ©es dans des textes de 1941 et 1923 8, lĂ©gitiment Ă la fois le didactisme des Ćuvres Ă©crites dans les premiĂšres annĂ©es et lâĂ©panouissement ultĂ©rieur.
LâentrĂ©e de la technique des douze sons fut, comme le fut celle dans le monde de la tonalitĂ© suspendue, trĂšs mĂ©nagĂ©e : dernier mouvement du DeuxiĂšme Quatuor (1908) derniĂšre des Cinq PiĂšces op. 23 pour piano (1923) ; une comparaison rapide entre la fougue de la deuxiĂšme piĂšce et la raideur de la cinquiĂšme donne une idĂ©e prĂ©cise de la radicalitĂ© du geste⊠Mais son autolĂ©gitimation fut inlassable : suite, sĂ©rĂ©nade, quatuor, quintette, variations renvoient Ă ce monde intouchable quâest lâhĂ©ritage classique (op. 24 Ă op. 31, 1923â1928). Le paradoxe devient alors parfois critique entre une Ă©criture dĂ©chiquetĂ©e et des barres de reprise qui imposent une signalĂ©tique dâun autre temps (Serenade op. 24, Suite op. 25 surtout). Tandis que LesVariations pour orchestre op. 31 (1928) rĂ©habilitent sans hiatus lâunivers brahmsien, leTroisiĂšme Quatuor op. 30 (1926) rĂ©introduit un Ă©lĂ©ment fondamental, la mĂ©lodie (le premier mouvement vise Ă retrouver celui du TreiziĂšme Quatuor de Schubert : organiser une ample phrase sur un ostinato de croches Ă©gales).
La charniĂšre entre la relative sĂ©vĂ©ritĂ© du style et son Ă©panouissement postĂ©rieur est lâincursion dans lâopĂ©ra ; MoĂŻse et Aaron (1930-1932) renoue avec lâinfinie douleur de celui qui sait mais nâa pas les mots pour convaincre. Les deux derniĂšres dĂ©cennies voient la musique de Schoenberg se dĂ©ployer dans des catĂ©gories formelles totalement inventĂ©es, sâappuyant souvent sur des textes trĂšs forts comme LâOde Ă NapolĂ©on op. 41, dĂ©nonciation de la tyrannie (1942), ou unSurvivant de Varsovie op. 46, hommage au martyr de tout un peuple (1947) ; dans ce dernier cas, le dĂ©coupage de la sĂ©rie-matrice perd son caractĂšre abstrait pour devenir la signalĂ©tique puissante du rĂ©cit tragique (appel de trompettes / accord sourd) et, au moment final oĂč les juifs entonnent le Shema IsraĂ«l, le fait que cette sĂ©rie soit chantĂ©e en mouvement droit, rĂ©trograde, transposĂ© etc. nâa plus guĂšre quâune importance trĂšs relative⊠Lâunivers schoenbergien est restĂ© implacablement le mĂȘme ; les incursions dans le nouveau classicisme choisi, qui nâa rien dâun nĂ©oclassicisme dont il refuse la tentation du pastiche âConcerto pour violon op. 36 (1936), Concerto pour piano op. 42 (1942) â sont traversĂ©es du mĂȘme souffle, avec des moments de rĂ©el apaisement offerts par une nouvelle pensĂ©e mĂ©lodique. Quant au Trio op. 45 (1946-1947), rĂ©digĂ© comme vĂ©ritable sismogramme aprĂšs une grave syncope et la survie in extremis, lâimbrication des violentes secousses (reprĂ©sentant pour Schoenberg les injections cardiaques reçues) dans un parcours « ultra-organisé » sur les plans thĂ©matique et formel, tĂ©moignent de la force dâun style bien au-delĂ de toute question de syntaxe.
La foi
Aux moments les plus critiques de la trajectoire, câest la force de la foi qui focalise lâĂ©nergie et le doute. 1917-1922 : LâEchelle de Jacob, qui sâinterrompt sur lâascension dâĂąme dâun mourant qui va enfin rencontrer son dieu, exhorte Ă ce moment prĂ©cis Ă la dissolution totale du moi, Ă lâabandon de toute conscience quâĂ©voquait dĂ©jĂ la lettre Ă Kandinsky sur la crise de lâĂ©criture. 1930-1932 : MoĂŻse et Aaronpose la question cruciale de la transmission de la parole de vĂ©ritĂ© aprĂšs les cinq premiĂšres annĂ©es de composition avec douze sons ; MoĂŻse ne chante pas, mais il sait, tandis que la vocalitĂ© est rĂ©servĂ©e Ă Aaron qui, lui, communique avec les hommes. Mais lâinscription de la Loi â titre du deuxiĂšme desChĆurs op. 35 â y reste fondamentale au mĂȘme titre que la conviction du principe de nĂ©cessitĂ© historique et morale.
Enfin, les annĂ©es du contrecoup du nazisme et de la guerre voient les derniĂšres et puissantes Ćuvres chorales, du Kol nidre op. 39 de 1938 aux trois Psaumes op. 50 de 1950. Si les deux Psaumes op. 50 a et b respirent un calme et une confiance en Dieu qui rĂ©sorbent les injonctions ponctuelles, le Psaume moderne op. 50 C renoue avec lâunivers schoenbergien dans ce quâil a de plus profond : puissance de la voix parlĂ©e (Sprechstimme) invoquĂ©e dĂ©jĂ dans les Gurre-Lieder de 1900 et jusquâau Survivant de Varsovie, prolifĂ©ration des taches sonores marquĂ©es dâexpressionnisme, violents soubresauts de lâĂ©criture vocale et instrumentale. La derniĂšre strophe, priĂšre pour lâunitĂ© avec Dieu comme suprĂȘme fĂ©licitĂ©, rĂ©tablit lâapaisement typique des derniĂšres annĂ©es dans lâatmosphĂšre dâapesanteur du dernier fragment de LâEchelle de Jacob.
Les trois Ćuvres majeures que sont LâEchelle de Jacob, MoĂŻse et Aaronet le**Psaume moderne ont en commun leur inachĂšvement ; lâinterrogation mĂ©taphysique reflĂšte celle du contenu de vĂ©ritĂ© dans lâart : elle reste en soi une quĂȘte perpĂ©tuelle.
Notes
Arnold Schoenberg, Le Style et lâIdĂ©e, p. 86. La citation exacte est « Quand je faisais mon service militaire, un officier supĂ©rieur mâaborda un jour par : âAinsi, câest donc vous, le cĂ©lĂšbre SchĆnberg ? â. Je rĂ©pondis : âA vos ordres, mon commandant. Personne ne voulait ĂȘtre SchĆnberg. Il fallait bien que quelquâun le fĂ»t. Aussi est-ce moiâ »
Alban Berg, Ecrits, Monaco ; Ă©ditions du Rocher, 1957.
Arnold Schönberg, Style et Idée, Paris, Buchet-Chastel, 1977, p. 217.
Parfois traduit par âĂ©lĂ©vation, ravissementâ.
Schoenberg-Busoni/Schoenberg-Kandinsky, Correspondances, textes, GenĂšve, Contrechamps, 1995.
La citation complĂšte est (dans Le Style et lâIdĂ©e, p. 166.) : « AprĂšs nombre de tentatives infructueuses pendant environ douze ans, je pus Ă©tablir les fondations dâun nouveau mode de construction musicale qui me parut apte Ă remplacer les diffĂ©renciations structurales dĂ©coulant auparavant de lâharmonie tonale. Jâai nommĂ© cette mĂ©thode : MĂ©thode de composition avec douze sons qui nâont dâautres parentĂ©s que celles de chaque son avec chaque autre. Cette mĂ©thode consiste essentiellement dans lâemploi constant et exclusif dâune sĂ©rie de douze sons diffĂ©rents. Ce qui veut dire, naturellement, que cette sĂ©rie ne rĂ©pĂšte aucun son et quâelle utilise les douze notes de la gamme chromatique, mais prises dans un ordre diffĂ©rent ».
T.W.Adorno, Philosophie de la nouvelle musique, Paris, Gallimard, 1962, p. 82.
Arnold Schönberg, Style et idée, op.cit. respectivement p.163, 167 et 155.