Au commencement de FROM WITHIN... était la volonté de deux artistes de se confronter avec le sacré, le transcendant, le spirituel, aussi bien intime qu’universel. Marquant la première collaboration des deux artistes atypiques que sont Marko Nikodijević et Robert Henke, cette œuvre transdisciplinaire interroge le sens de l’existence dans un monde en profonde mutation, mais aussi la relation entre spiritualité et science.
Si dès le départ l’intention était d’articuler étroitement discours musical et visuel, et d’enrichir l’expérience du concert grâce aux multiples possibilités ouvertes par l’informatique et les nouvelles technologies, le dispositif sur lequel les deux hommes sont tombés d’accord reste simple en apparence. Les concepts qu’ils désirent aborder étant d’ordre métaphysique, il leur importait de pouvoir y projeter une grande variété d’émotions et d’impressions, tout en évitant qu’une image trop claire vienne restreindre la réflexion, voire refermer l’imaginaire.
La salle de concert est donc prise telle quelle, sans altération, afin de bénéficier de ses propriétés acoustiques et de son aspect général – c’està-dire : une coquille vide. L’ensemble instrumental n’est pas spatialisé non plus, il est dans son intégralité sur le plateau. Le discours électronique, en revanche, déploie son holophonie sonore grâce à la WFS (diffusion par Wave Field Synthesis) pour métamorphoser l’espace de la salle. De la même manière, la lumière fait l’objet d’une attention particulière – pour faire pièce à la précision spatiale des instruments acoustiques, Robert Henke a imaginé une sculpture composée de LED : celle-ci se présente sous la forme d’une matrice de longues lignes verticales de lumières colorées réparties irrégulièrement le long du haut-parleur en barre du WFS. Un dispositif simple, donc, mais ouvert, du point de vue combinatoire, à de hauts niveaux de complexités internes.
FROM WITHIN... est le fruit d’une longue genèse. Cette œuvre s’est construite au long d’allers et retours inlassables entre les deux artistes. Si l’un et l’autre ont leurs compétences propres – à Robert Henke le visuel et lumineux, à Marko Nikodijević l’écriture et l’orchestration de la partition –, celles-ci se rejoignent parfois autour de la génération des textures et des traitements informatiques. Ainsi l’œuvre devient-elle véritablement collaborative : à force d’échanges, une structure formelle de la pièce se dégage « from within » (de l’intérieur) et un concept physique, comme celui de l’érosion, peut se transformer en geste immersif et quasi « métaphysique ».
Jérémie Szpirglas