Ressources.ircam

Enregistrement © ircam Luca Bagnoli
-
Plusieurs motets pour grand chœur, solistes, orgue et orchestre de Jean-Philippe Rameau sont parvenus jusqu’à nous, composés avant son arrivée à Paris en 1723 – et donc antérieurs aux grandes pièces profanes qui l’ont fait connaître. Ce Laboravi clamans est très certainement un mouvement d’un de ces grands motets, dont la partition n’a pas été achevée, ou dont les autres mouvements ont été perdus. Nous n’en avons connaissance que grâce à son utilisation par Rameau lui-même dans le Traité de l’harmonie réduite à ses principes naturels, son premier traité de théorie musicale publié en 1722. Il apparaît au Livre Troisième, consacré aux « Principes de composition », comme illustration du chapitre consacré à la fugue.

Car ce Laboravi clamans est une fugue, indubitablement – même si le terme de «fugue », dans le texte de Rameau, se rapporte non à la forme de la «fugue » comme on l’entend aujourd’hui, mais au «sujet» de ladite fugue. Voici ce que le compositeur lui-même écrit au sujet de son Laboravi clamans: «Cet Exemple contient quatre Fugues differentes; et il n’y a guéres de Musique où il s’en trouve davantage à la fois; l’on se contente même souvent de n’y en inserer qu’une ou deux, mais avec cela on peut les renverser, ce qui ne contribuë pas peu à la perfection de l’Ouvrage.»

Suivent des conseils fort pédagogiques aux apprentis compositeurs, que Rameau conclut ainsi : « La Fugue est un ornement dans la Musique, qui n’a pour principe que le bon goût; de sorte que les Regles les plus generales que nous venons d’en donner, ne suffisent pas encore pour y réüssir parfaitement.
Les differens sentimens et les differens évenemens que l’on peut exprimer en Musique, sément à tout moment des nouveautez que l’on ne peut reduire en regles. La parfaite connoissance de l’Harmonie nous découvre à la verité toutes les routes que nous pouvons tenir en ce cas; mais le choix de ces routes dépend de nôtre goût, et ce goût a besoin d’une certaine experience, qui ne s’acquiert qu’à force de voir et d’entendre les Ouvrages des plus habiles Auteurs dans ce genre.»