Contenus numériques consultables dans leur intégralité au sein de la Médiathèque de l'Ircam

Œuvre de
  • Maurizio Azzan (compositeur)
Participants
  • Anna Piroli (soprano)
  • Leonhard Garms
  • Étienne Démoulin (réalisateur informatique musicale)
  • Sylvain Cadars (ingénieur du son)
  • Ensemble Schallfeld

Création française
Enregistrement Binaural © Ircam - Martin Antiphon
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L’histoire d’Ariadne, abandonnée par Thésée sur l’île désertée de Naxos, après avoir quitté pour lui le foyer familial, est l’un des plus fameux mythes de la Grèce antique.
Si l’une de ses versions les plus connues est celle de l’arrivée de Bacchus sur l’île et son mariage subséquent avec Ariadne, la plupart d’entre elles se soldent sur sa mort, provoquée par l’égoïsme de son amant. Qu’elle se pende ou meurt en couche – des œuvres de Thésée –, qu’elle soit tuée au cours d’une bataille ou monte au ciel après avoir été forcée à suivre Bacchus, Ariadne est une victime sans défense, sous le regard de milliers de dieux qui peuplent la Terre et les Mers. Des dieux qui observent le spectacle de cette femme pleurant sur les rives de Naxos comme ils considéreraient les vains efforts d’un insecte enfermé dans une bouteille : elle ne peut que se soumettre au destin, parce qu’ils n’en ont rien à faire. Son désespoir, sur cette île déserte, gardée de toutes parts par les flots, est le symbole même de la solitude : un lieu où l’obsession tourne et tourne
sur elle-même, sans autre issue que la mort.
Ariadne est donc le récit d’une absence par abandon. Une femme naufragée sur une île déserte tente de rassembler toutes les pièces du puzzle de sa vie. Des bribes de souvenirs se détachent d’un brouillard dense dans lequel se mêlent différentes versions du mythe, avec pour seul invariant la voix d’Ariadne à laquelle personne ne prête attention, passée inaperçue du regard négligent des dieux.
La protagoniste, dans un ultime effort d’échapper à sa condition, tente de se retrouver elle-même, afin de retracer une vérité qui, en dépit de la variété des légendes, pourrait mettre un terme à ses souffrances.
Ariadne est un monodrame pour voix, instruments spatialisés et électroniques, pensé comme une installation immersive, qui commence avant même que le public ne pénètre dans la salle de concert, de sorte que l’espace de la performance, les instruments, la voix et le public lui-même s’étend des confins du foyer et de ses rumeurs, jusqu’aux voix des différents destins d’Ariadne encagés dans les instruments augmentés, disséminés dans la salle comme autant de récifs dans la mer, et jusqu’au public, qui figure l’onde emprisonnant Ariadne en même temps que l’indifférence des dieux à sa peine.
Au moment même où le public pénètre dans la salle de concert, la musique commence à prendre forme, peu à peu, transformant les bruits de fond en sons, au moyen de l’électronique en temps réel, dans un processus qui brouille les frontières entre performance et audience, laquelle devient un élément actif du dispositif.
Maurizio Azzan & Daniele Bellomi

Ariadne

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