Ce que j’ai vraiment aimé dans la traduction d’Olivier Cadiot, c’est son jeu avec les mots, sa liberté théâtrale et vivante avec les versions antérieures du Psaume 4. Dans la Vulgate par exemple, le second verset indique « meae in tribulatione dilatasti mihi miserere mei », ce qui pourrait avoir affaire avec une vieille miséricorde divine face à nos pauvres turpitudes (la Bible de Jérusalem nous dit bien « sauvez-vous ! » quand nous sommes dans la détresse), alors qu’ici, tout au contraire, Yhwh nous fait reprendre un peu d’air au moment de boire la tasse (« Asphyxié/tu élargis mon souffle »). Pour des chanteurs, cette situation est connue : alors que nos poumons sont vides, un « quelque chose » nous aide à terminer la phrase, le mot, la dernière note. Et quel est donc ce « quelque chose » ? Certainement pas, pour ma part, la volonté d’un Dieu irascible à longue barbe, au nom imprononçable ! J’y vois plutôt une volonté humaine, surpassée, alliant tous les problèmes techniques – du corps – à une spiritualité belle et simple. Ce cri d’invocation (« Cum invocarem ») se transforme finalement en cri personnel, « à soi », et si chacun a fait la paix avec lui-même, il s’écoute ; et si chacun écoute l’autre, il peut faire la paix, sans extrémisme, sans boire la tasse.
Alain Berlaud.