Kaija Saariaho entretient une affinité très spéciale avec les instruments à cordes, visible dans ses deux précédents concertos (Amers pour violoncelle et ensemble, et ...à la fumée pour violoncelle, flûte alto et orchestre), ainsi que dans son quatuor à cordes et nombre de pièces solistes.
Ce concerto en deux mouvements trouve sa source d'inspiration première dans la virtuosité du dédicataire, Gidon Kremer. Sa capacité à combiner les plus grandes prouesses techniques et le plus intense lyrisme est constamment exploitée dans la partie soliste : celle-ci semble vouloir épuiser toutes les possibilités techniques de l'instrument, depuis les gestes propres aux techniques violonistiques traditionnelles (celles des Etudes de Paganini) jusqu'aux techniques instrumentales les plus nouvelles.
Le titre est une allusion à une nouvelle de l'écrivain français Jacques Roubaud. Kaija Saariaho y voit une métaphore de la forme de la pièce comme des relations entre soliste et orchestre. Le travail est analogue à une « histoire vivante » du soliste, l'orchestre représentant une image du monde environnant, parfois contradictoire, qui semble souvent s'opposer au soliste. Le but du voyage n'est seulement révélé que dans les dernières sections de l'œuvre, le « Graal » de la musique, quand, à tous les niveaux, la relation entre les deux protagonistes se trouve finalement stabilisée.
Jean Noël van der Weid, notice du Festival Présences 1996, Radio France.