Ce titre est emprunté à la nouvelle Tlön, Uqbar, Orbis tertius de Jorge Luis Borges, qui traite de la question épistémologique de l’influence des structures langagières sur la perception de la réalité. Dans le monde imaginé par Borges (Tlön), la « doctrine du matérialisme » est considérée comme une hérésie, en opposition à l’idéalisme de Berkeley, bien connu pour questionner l’existence du son d’un arbre tombant en pleine forêt s’il n’y a personne pour l’entendre (Berkeley en disant que Dieu sera toujours là pour l’entendre). À Tlön, donc, un idéalisme Berkeleyen « sans dieu », accordant à la perception un rôle fondamental et niant toute réalité sous-jacente est de bon sens. Uqbar, pour sa part, est un lieu imaginaire décrit dans la littérature de Tlön. Il est doublement fictionnel, puisqu'au sein même de la narration c'est un lieu de fiction. Inspiré par cette nouvelle et par l’ironie de ses propos, je me suis penché sur une écriture instrumentale détournée comme base des traitements électroniques pour instaurer un univers doublement fictionnel par rapport aux références historiques du violoncelle. L’écriture instrumentale consiste donc en une série de gestes et d’actions, choisies pour leurs seules qualités perceptives et qui trouvent leur complétude dans leur extension électronique. Ainsi, j’ai travaillé sur la captation de l’archet du violoncelle pour contrôler de façon dynamique certains traitements électroniques, dont la spatialisation. L’idée étant de créer un monde sonore cohérent où les frontières entre instrument et électroniques tendent à s’effacer.
Sébastian Rivas.