biography of Conlon Nancarrow
Mis à jour le 15 septembre 2010

Conlon Nancarrow

Compositeur mexicain d'origine américaine né le 27 octobre 1912 à Texarkana, Arkansas, mort le 10 août 1997 à Mexico.

Samuel Conlon Nancarrow est né le 27 octobre 1912 à Texarkana, dans l’Arkansas, ville où son père, prénommé Samuel également, avait été muté par son employeur, la Standard Oil. Samuel Nancarrow en deviendra le maire entre 1925 et 1930. On peut encore voir son nom, sans doute d'origine galloise, sur plusieurs plaques et monuments de la ville. Indocile dès son plus jeune âge, Conlon est expédié dans une école militaire pour y apprendre la discipline. Au lieu de cela, il se retrouve « contaminé par le virus de la musique » et commence à jouer du jazz à la trompette. Nancarrow père expédie alors Conlon à Vanderbilt University pour qu’il y poursuive des études d’ingénieur. Mais Conlon n’assiste qu’à quelques rares cours et, de sa propre initiative, part s’inscrire au Cincinatti College Conservatory pour y étudier la musique. C’est là qu’il entendra le Cincinatti Symphony dans l’une des toutes premières interprétations du Sacre du Printemps aux États-Unis, un événement qui suscitera en lui cette fascination pour Stravinsky et pour le rythme qui ne devait plus le quitter.

Il déménage ensuite à Boston, où il suit, en privé, l’enseignement de Roger Sessions, Walter Piston et Nicolas Slonimsky. Il y a peut-être croisé la route d’Arnold Schoenberg qui venait de s’expatrier (Nancarrow a toujours dit n'avoir pas souvenir d’une telle rencontre mais sa première femme a affirmé qu’elle et lui s’étaient rendus à une soirée dans l’appartement de Schoenberg, à Brookline). À l’époque, comme beaucoup d’artistes américains des années trente, Nancarrow adhére au Parti communiste, ce qui l’amène à participer à la Guerre civile d’Espagne en 1937-1938 avec la Brigade Abraham Lincoln. Il reçoit un éclat d’obus dans la nuque, réussit de justesse à prendre la fuite à bord d’un avion-cargo qui transportait de l’huile d’olive, et sera acclamé en héros à son retour dans l’Arkansas, par des gens persuadés qu’il était parti pourfendre le catholicisme. Reparti pour New York, Nancarrow y fait la connaissance d’Elliott Carter, Aaron Copland, John Cage et Wallingford Riegger. Mais, apprenant que ses camarades étaient inquiétés par le gouvernement américain à cause de leurs accointances communistes, il s'expatrie à Mexico City en 1940.

Toutefois, il ne manque pas d’emporter le livre d’Henry Cowell, New Musical Resources, qu’il avait acheté à New York City. Une véritable révolution. Ce livre élaborait en détail une nouvelle approche de la complexité rythmique et suggérait d’utiliser le piano mécanique pour automatiser l’exécution. En 1947, Nancarrow reçoit une somme d’argent provenant d’un fonds en fideicommis laissé par son père. Il l’utilisera pour retourner à New York City et acheter un piano mécanique. Il visite également la maison QRS, une société du Bronx qui fabriquait des rouleaux pour piano mécanique. C’est là qu’il découvre une machine permettant de perforer des rouleaux à la main et trouve un ouvrier qui accepte de lui en réaliser une copie. À ce stade, entre 1930 et 1945, Nancarrow avait composé un peu moins d’une douzaine d’œuvres brèves pour des instruments traditionnels : quelques pièces pour piano, un septuor, un quatuor à cordes, une toccata pour violon et piano, une pièce à plusieurs mouvements pour orchestre de chambre. La plupart abordait l’écriture à plusieurs tempi ou comportait, au moins, des idées rythmiques complexes. Les rares fois où il avait essayé de les faire interpréter, Nancarrow avait été refroidi par la piètre qualité technique du résultat. Par la suite, de retour à Mexico City, dans un studio construit avec l’argent de sa seconde femme – qui était peintre et travaillait comme modèle pour Diego Rivera–, il s’attelle pour de bon à l’écriture d’une série d’études pour piano mécanique qui lui permettront, espère-t-il, de laisser libre cours à sa créativité rythmique.

Nancarrow envoie une partition de son Étude rythmique n° 1 à Elliott Carter, qui en citera un extrait à titre d’exemple, dans un article qu’il intitulera “The Rythmic Basis of American Music”. Cet article sera publié dans le magazine The Score, en juin 1955. Vers 1960, un enregistrement sur bande des premières études de Nancarrow tombe entre les mains de John Cage. Cet enregistrement sera utilisé par son compagnon, Merce Cunningham, comme support à un spectacle chorégraphique. Les pièces qui avaient servi à ce spectacle seront ensuite gravées (1969) sur un disque Columbia qui ne connut qu’une existence éphémère.

À part ces deux épisodes et un commentaire d’Aaron Copland sur ses premières pièces, Nancarrow ne connaîtra pas d’autre manifestation d’une quelconque reconnaissance avant l’âge de 63 ans. L’année suivante, en 1976, Charles Amirkhanian commence à mettre sur le marché les enregistrements du compositeur sous son label, 1750 Arch. En 1981, Nancarrow obtient un visa et se rend aux Etats-Unis pour la première fois depuis les années quarante. Au cours des années qui suivent, il sera mis à l’honneur au Cabrillo Festival, au festival ISCM de Graz et lors d’autres manifestations, à Innsbruck, à Cologne et à l’Ircam. Il s’y rendra parfois en compagnie du compositeur György Ligeti qui qualifiait ainsi sa musique : « la plus grande découverte depuis Webern et Ives… tellement originale, agréable, parfaitement construite mais également émouvante… Pour moi, cette musique surpasse celle de n’importe quel compositeur vivant aujourd’hui. » (Lettre à Charles Amirkhanian, 4 janvier 1981, Vienne).

À mesure que s’étend cette popularité nouvelle, les commandes d’interprètes reprennent. Ainsi, Nancarrow se remet à écrire pour de vrais instrumentistes, pour la première fois depuis 1945. Il écrit deux pièces pour piano, Tango? et Three Canons for Ursula, une Pièce n° 2 pour petit orchestre, un deuxième trio et, pour le Quatuor Arditti, un Quatuor à cordes n° 3, d’une prodigieuse difficulté.

Dans les dernières années de sa vie, Nancarrow a souffert d’emphysème, maladie que la pollution de Mexico City n’a fait qu’aggraver. Il a envisagé de revenir aux États-Unis, mais on lui a dit qu’il devrait signer un document stipulant qu’il renonçait à son attachement « juvénile et déraisonnable » au communisme, exigence à laquelle il opposera un refus hautain. Il meurt le 10 août 1997.

© Ircam-Centre Pompidou, 2010


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