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L’année 2020 a été difficile, pour tout le monde. J’ai vécu le premier confinement aux États-Unis. Je vivais alors à Berkeley, dans une petite maison sans jardin. On ne pouvait pas sortir pendant la journée et on avait le sentiment que la fin du monde approchait. La loi martiale est également entrée en vigueur dans la région de la baie de San Francisco pendant quelques semaines: il n’était alors plus possible de sortir, de jour comme de nuit. Les soldats sillonnaient les rues de San Francisco.
L’ambiance était surréaliste et nauséabonde. Le recours à la loi martiale avait été motivé par une série d’émeutes en réaction aux meurtres racistes perpétrés par la police à la mi-2020, dont celui de George Floyd.
Au cours de ces mois, j’ai souffert de la situation globale mais aussi de diverses contrariétés plus personnelles. Contrairement à de nombreux artistes qui, au cours de ces mois, ont réussi à transcender l’épreuve, la situation que je vivais m’a conduit à une fermeture totale au monde. Je n’ai pas été en mesure d’élaborer de transfiguration cathartique des événements et n’ai fait qu’intérioriser.
La convergence de ces souffrances «sociétale » et personnelle m’a fait vivre une épiphanie. Me sentant « compromis», en tant qu’individu et membre de notre société, quelques vers du Macbeth de Shakespeare me sont venus à l’esprit :
I am in blood
Stepped in so far that, should I wade no more,
Returning were as tedious as go o’er.
(dits par Macbeth, Acte III, Scène 4, 136–8)
J’ai marché si loin dans le sang que, si je ne traverse pas le gué,
j’aurai autant de peine à retourner qu’à avancer.
(Traduction de François-Victor Hugo, Livre de Poche)
Ces vers m’ont fait penser à Derek Chauvin, le policier qui a étranglé George Floyd en posant son genou sur son cou pendant dix minutes. Il a fallu dix minutes pour le tuer, dix minutes pendant lesquelles George Floyd a imploré grâce, disant qu’il ne pouvait plus respirer, appelant sa mère à l’aide. Alors je me suis demandé si Derek Chauvin s’était un instant, au cours de ces dix minutes, dit qu’il était allé trop loin et que revenir en arrière lui était désormais aussi difficile que de continuer à tuer. Je me suis demandé s’il avait continué à tuer parce qu’il se sentait d’ores et déjà trop impliqué, compromis.
Deux ans plus tard, j’ai ressenti le besoin d’exprimer ces sensations: cette pièce en est le résultat.
Carmine-Emanuele Cella
April 25, 2023 00:39:17
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