Colloque

  • Saison 2023-2024 - None - None > Musique et maladie
  • Oct. 19, 2023
  • Ircam, Paris
  • Program note: Musique et maladie
Participants
  • Martin Barré (conférencier)

À l’heure où foisonnent les ouvrages concernant les manières de vaincre ou de dompter le trac, où deviennent obligatoires dans les conservatoires les formations pour lutter contre le stress, donnant lieu parallèlement à la floraison de coachs privés, il semble crucial d’interroger l’historicité d’un tel phénomène. Connu, éprouvé et perçu, le « trac » n’est pourtant désigné par ce terme qu’à partir de la seconde moitié du xixe siècle. Avant cette période, un ensemble de termes aux contours flous sert à décrire ce sentiment sans nom véritable. Ce n’est qu’à mesure qu’elle fait son entrée dans la nosographie que ce que nous appellerons la peur de la scène se précise d’un point de vue terminologique.
C’est d’abord la peur en soi qui commence par faire l’objet d’un intérêt médical comme en témoignent les dissertations de médecine dont le nombre ne cesse de croître à ce sujet (Mathieu, 1809 ; Follain, 1815, Thion, 1816). « Peur » sert alors de terme valise occultant toute possibilité de nuances et de hiérarchie. Il faut attendre la seconde moitié du xixe siècle pour que se développe une gamme d’émotions relatives à la peur dans laquelle figure le trac qui sera rapidement associé aux milieux artistiques. Terme issu de l’argot, le trac intègre petit à petit le vocabulaire des élites et suscite de plus en plus l’intérêt des médecins, notamment ceux travaillant sur l’appareil phonatoire tels que Francesco Bennati ou plus tard Louis Mandl. L’intérêt médical pour cette émotion connaît un nouveau tournant dans l’entre-deux-guerres à travers les travaux des adeptes des médecines non conventionnelles telle la naturopathie, à l’instar des frères Durville, pionniers dans les études sur le trac ou encore des partisans de la médecine plus traditionnelle (Gratia, 1923 ; Lapy, 1926).
Nous nous proposons d’étudier le glissement terminologique et médical qui s’est opéré en France durant la période allant du Second Empire à l’entre-deux-guerres marquant un tournant dans la connaissance des pathologies liées aux artistes. Cette étude se concentrera particulièrement sur les artistes lyriques en s’appuyant sur des sources variées allant des dissertations de médecine à la presse musicale en passant par les mémoires de chanteurs et les ouvrages de médecines parallèles.

Musique et maladie : jour 1

Entre histoire de la musique, histoire de la médecine et philosophie des sciences dans le monde occidental, ce colloque international se propose d’interroger les conditions et les méthodes de leur dialogue à l’âge moderne, du XVIIIe siècle à nos jours : études de cas, pathographies d’artistes, maladies et représentations du malade à l’opéra, spécialités médicales, psychiatriques, cardiologiques ou pneumologiques, à l’aune de l’œuvre… Comment comprendre la place accordée à la musique et au musicien dans les écrits médicaux, qu’ils relèvent de l’anatomie, de la physiologie ou de la thérapie ? Que retenir de l’intérêt des artistes eux-mêmes pour les sciences médicales ? Prises au sérieux et non réduites au rang de curiosités, ces questions ouvrent un vaste champ d’études, celui du corps du musicien, créateur aussi de symptômes.

Comité scientifique :
- Vincent Barras (Institut des humanités en médecine, Lausanne)
- Laurent Feneyrou (CNRS – STMS, Paris), Céline Frigau Manning (Université Jean Moulin Lyon 3 – IHRIM)
- Philippe Lalitte (Sorbonne Université – Iremus – Collegium Musicae, Paris)
- Emmanuel Reibel (Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris – École normale supérieure de Lyon).

From the same archive