Eterno Vuoto, Pasquale Corrado 17:22
- Set ManiFeste (festival-académie)
- ManiFeste 2024 - 2024-05-30 - 2024-06-22 > Visions
- June 13, 2024
- Centre Georges Pompidou, Paris
- Program note: Visions
Œuvre de
- Pasquale Corrado (compositeur)
Participants
- Ljuba Bergamelli (soprano)
- Laura Muller (mezzo-soprano)
- Léo Warynski (direction)
- Pasquale Corrado (réalisateur informatique musicale)
- Francesco Abbrescia (réalisateur informatique musicale)
- Luca Bagnoli (diffusion sonore Ircam)
- Ensemble Multilatérale
enregistrement @ Ircam - Oscar Ferran
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Cette pièce, dont l’inspiration provient de la nouvelle fantastique de Borges, La bibliothèque de Babel, combine deux concepts opposés, symbolisés par son titre Eterno Vuoto, qui signifie littéralement « vide éternel ». Tout d’abord, le terme « éternel » suggère l’idée de quelque chose qui n’a pas de fin, qui ne connaît pas de limites de temps ou d’espace. Il évoque l’immensité de la bibliothèque de Borges : une infinité de possibilités et de combinaisons de connaissances. D’autre part, le terme « vide » évoque un sentiment de manque, d’absence de sens ou de but. La bibliothèque de Borges, bien qu’elle contienne une énorme quantité d’informations, n’offre pas de réponse définitive ou de sens ultime.
Le texte de la 1re scène est tiré de la Métaphysique d’Aristote (Livre IV, Chap.1) et traite de thèmes tels que l’être, l’existence et la connaissance. Les voix se mêlent pour produire un morphing timbrique et spatial, et leur traitement crée un chemin de reconstruction de la parole, qui avait précédemment été détruit. L’ensemble soutient cette reconstruction et en colore les contours.
Le texte de la 2e scène s’inspire de l’allégorie de la caverne de Platon (la République, Livre VII) en faisant référence aux notions de perception déformée de la réalité et de recherche de la vérité : une déformation qui nous parvient aussi musicalement par une utilisation extrême de la voix et de l’instrumentalité.
Des extraits de la Bible, dont l’« Épître aux Romains de saint Paul » (1:18-25) et l’« Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean » (8:31-32) sont utilisés dans les 3e et 4e scènes, qui traitent de thèmes spirituels et philosophiques, tels que la recherche de la vérité et le conflit entre la foi et la connaissance.
Les Pensées pour moi-même de Marc Aurèle (Livre VI, n° 30), qui ont inspiré une partie des textes de la 4e scène, explorent la nature transitoire de l’existence humaine et la recherche d’un sens plus profond de la vie.
Ces écrits contribuent à souligner la tension entre l’immortalité de la connaissance et le vide éternel et existentiel auxquels l’humanité est confrontée. Ils constituent une référence musicale constante dans les choix d’écriture variés liés à l’utilisation particulière de la voix, à travers la création d’une voix unique qui se divise perpétuellement en deux chemins parallèles, qui se croisent, dialoguent et se mélangent, se contaminant l’un l’autre et donnent finalement naissance à de nouvelles figures. Ces figures musicales, aux possibilités infinies, se mêlent aux textures et à l’instrumentalité électroniques, laissant ainsi les spectateurs ébahis.
Pasquale Corrado, note de programme du concert ManiFeste du 13 juin 2024 dans la Grande Salle du Centre Georges Pompidou.
Visions
Vingt ans après sa disparition, Fausto Romitelli exerce encore une influence forte sur la jeune génération des compositeurs. Il incarne l’hybridation réussie de la pop et du savant, le chaos expressif et la pulsation fusionnelle, l’état psychédélique assumé et surmonté, ainsi qu’en témoigne la violence d’Amok Koma.
Hallucinations et visions intérieures ? Elles s’inscrivent dans Visions de Matteo Franceschini, marqué par l’imagination débridée de William Blake, graveur, dessinateur, peintre et poète pré-romantique. La dramaturgie s’inscrit dans un monde d’archétypes, d’attractions et répulsions entre texte et musique. Apparence ou vérité ? Eterno Vuoto de Pasquale Corrado reprend cette interrogation ancestrale portée par Platon, Marc Aurèle ou Saint Paul, pour en faire l’argument de sa création où la vocalité va envahir l’ensemble et l’électronique. Tension physique et résistance de l’instrument : autre grand geste romitellien ? Konter d’Eva Reiter naît de ce corps-à-corps reconduit et toujours irrésolu.