information

Type
Séminaire / Conférence
performance location
Ircam, Salle Igor-Stravinsky (Paris)
duration
37 min
date
April 10, 2018
program note
Michel Imberty

La résurgence d’un monde ancien fait partie du discours propre de la postmodernité musi- cale, et de nombreuses œuvres de la n du vingtième siècle y font référence. Dans le cas de l’Orchestre d’instruments traditionnels et nouvelles technologies, cela prend une dimension beaucoup plus radicale encore. L’orchestre prétend retrouver l’esprit de la musique préco- lombienne, mais les ambiguïtés entre reconstitution et création sont présentes et incon- tournables. Quel est le sens que l’orchestre confère à ce travail ? Aux dires de son directeur le compositeur Alejandro Iglesias Rossi, l’orchestre cherche à donner aux instruments autochtones américains «la même dignité ontologique que les instruments occidentaux». Il cherche à pouvoir faire une musique originale et traditionnelle, conforme au ressenti des cultures amérindiennes disparues. Pour ceci les membres de l’orchestre réalisent un travail double: d’une part, ils récupèrent ou façonnent des instruments précolombiens (travail ethnomusicologie et même archéologique) et d’autre part, ils incorporent ces instruments dans leurs œuvres (travail de création musicale).
Mais dans quelle mesure cette recherche basée sur la restitution de la mémoire ne constitue- t-elle une véritable ré-invention du passé? Un premier indice de réponse viendrait de Sigmund Freud, qui, dans son article «Un souvenir d’enfance» de Poésie et vérité af rme que nos actions et comportements ne sont pas nécessairement la réponse aux événements passés de notre enfance. Ils répondraient plutôt aux souvenirs du discours maternel.
En parlant à propos du lm Poétique du cerveau de Nurith Aviv, le psychologue François Ansermet introduit l’idée que la mémoire est dynamique. Les traces du souvenir devien- draient labiles lors de son évocation et ils seraient susceptibles de s’associer avec d’autres traces, pour former des souvenirs pour ainsi dire chimériques. Ainsi la mémoire perd ses contours originaux pour se rendre disponible à de nouvelles constructions, pour élaborer des inventions « qui ne sont pas fausses, bien sûr ; nous ne sommes pas dans les questions du vrai et du faux : ce qui compte, c’est l’invention ».
Cette conception de la mémoire comme création convoquant un travail foncièrement interdisciplinaire de création musicale qui se réalise à partir des vestiges laissés par des cultures disparues, nous oblige à interroger des aspects fondamentaux de la psychologie de la musique.


Michel Imberty : la psychologie de la musique au-delà des sciences cognitives - 1er jour

Si les travaux de Michel Imberty dans le domaine de la psychologie cognitive de la musique sont connus (Entendre la musique, 1979, Les écritures du temps, 1981), ils ne s’inscrivent dans les courants comportementalistes et structuralistes de l’époque que d’une manière particulière et partielle. Dans ces ouvrages comme dans les nombreux articles qui suivront, progressivement se dégagent deux thèmes interdisciplinaires et surtout une position épistémologique plus proche de celle de l’anthropologie ou de l’ethnomusicologie, position qu’on pourrait qualifier de phénoménologique. Ces deux thèmes sont d’une part la temporalité et /ou le temps musical – le plus ancien dans sa réflexion - , la nature et l’origine de la musicalité humaine d’autre part, concept central développé parallèlement dans l’ouvrage de 2005, La musique creuse le temps. Or c’est aussi dans cet ouvrage que la position phénoménologique du chercheur est affirmée, car la réflexion sur le temps musical pose non seulement des problèmes de cognition au sens classique, mais des problèmes de sens et de signification qui étaient déjà la matière des deux premiers ouvrages. Le sens pose la question de l’intentionnalité, et on ne peut travailler sur la musique – comme sur toute œuvre humaine – sans s’interroger à la fois sur les conduites (du compositeur, de l’exécutant-interprète, de l’auditeur), et sur le sens que ces conduites ont pour ceux qui en sont les actants intentionnels. Plus encore, on ne peut le faire sans s’interroger sur le sens que tout cela prend pour le chercheur lui-même, le sens qu’il donne à sa recherche par rapport à ce que les sujets qu’il interroge en perçoivent eux-mêmes. En interrogeant la musique à travers un large champ de recherche, qui va des théories psychanalytiques au bouclage du temps dans un parcours « proto-narratif » tel que la biologie contemporaine en relève les traces dans le fonctionnement cérébral, Michel Imberty a ouvert un espace considérable à l'interprétation des faits musicaux, et ses écrits interrogent aussi bien le musicologue et l'analyste de la musique que le psychologue ou le philosophe qui s'intéresse à la manière dont l'être humain donne sens à la temporalité. Ce colloque, intitulé « Michel Imberty, la psychologie de la musique au delà des sciences cognitives » se propose d’accueillir les contributions de chercheurs qui ont été à un moment ou à un autre de leur parcours, marqués par cette pensée qui fait entendre le fait musical sous un angle radicalement renouvelé.

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1, place Igor-Stravinsky
75004 Paris
+33 1 44 78 48 43

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Closed Saturday and Sunday

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