informations

Type
Séminaire / Conférence
Lieu de représentation
Ircam, Salle Igor-Stravinsky (Paris)
durée
27 min
date
11 avril 2018
note de programme
Michel Imberty

L’immersion sonore est un terme apparu à la fin du vingtième siècle, en particulier dans un contexte d’enrichissement des moyens technologiques. Ce terme révèle une forme d’innovation dans les méthodes de création, mais il concerne en premier lieu une nouvelle attitude d’écoute, et il propose une modification radicale des fonctions musicales. En proposant une nouvelle expérience sonore, l’immersion élargit notre réflexion sur l’écoute, le son et la musique.
Nous voudrions interroger ici ce concept d’immersion non pas dans ses aspects techniques, mais dans ceux qui touchent à la psychologie. Le terme même d’immersion donne à penser un rapport au son qui n’est pas anodin, ne fût-ce que pas son allusion métaphorique à la mer, et à travers ce sens aquatique, à une situation prénatale, plus précisément, dans un bain sonore intra-utérin. Les études sur ce domaine, nous proposent diverses visions intéressantes et des situations d’étude concrètes. La représentation de l’état liquide en musique est remarquée par des analystes comme Francesco Spampinato, en particulier dans son ouvrage Debussy, poète des eaux – Métaphorisation et corporéité dans l’expé- rience musicale (2011). Mais elle a aussi attiré l’attention des psychologues, notamment quand ils doivent rendre compte de l’importance du sens primitif ou de l’observation des activités psychiques et physiques qui mettent en jeu le rapport extériorité et intériorité. Ainsi apparaît chez Sigmund Freud la notion de «sentiment océanique» dans le dialogue avec le musicologue Romain Rolland qui ouvre Malaise dans la civilisation (1929). Ce rapport à la sonorité entre également en résonance avec les travaux de Didier Anzieu sur «l’enveloppe sonore de soi» et la notion de bain métaphorique qu’il développe dans son livre Le Moi-peau (1974).
Nous nous proposons d’interroger ces notions, car elles pourront nous aider sans doute à comprendre les articulations de notre intériorité que met en jeu le phénomène d’immersion en musique. L’immersion, l’action d’immerger, est également associée à une plongée dans certains états intimes, inconnus, illimités, ou de néant, voire à des «états modifiés de la conscience». Par conséquenct l’immersion sonore, peut nous aider à mieux comprendre certains enjeux cruciaux pour la ré exion sur les aspects psychologiques et psychique de la musique.


Michel Imberty : la psychologie de la musique au-delà des sciences cognitives - 2e jour

Si les travaux de Michel Imberty dans le domaine de la psychologie cognitive de la musique sont connus (Entendre la musique, 1979, Les écritures du temps, 1981), ils ne s’inscrivent dans les courants comportementalistes et structuralistes de l’époque que d’une manière particulière et partielle. Dans ces ouvrages comme dans les nombreux articles qui suivront, progressivement se dégagent deux thèmes interdisciplinaires et surtout une position épistémologique plus proche de celle de l’anthropologie ou de l’ethnomusicologie, position qu’on pourrait qualifier de phénoménologique. Ces deux thèmes sont d’une part la temporalité et /ou le temps musical – le plus ancien dans sa réflexion - , la nature et l’origine de la musicalité humaine d’autre part, concept central développé parallèlement dans l’ouvrage de 2005, La musique creuse le temps. Or c’est aussi dans cet ouvrage que la position phénoménologique du chercheur est affirmée, car la réflexion sur le temps musical pose non seulement des problèmes de cognition au sens classique, mais des problèmes de sens et de signification qui étaient déjà la matière des deux premiers ouvrages. Le sens pose la question de l’intentionnalité, et on ne peut travailler sur la musique – comme sur toute œuvre humaine – sans s’interroger à la fois sur les conduites (du compositeur, de l’exécutant-interprète, de l’auditeur), et sur le sens que ces conduites ont pour ceux qui en sont les actants intentionnels. Plus encore, on ne peut le faire sans s’interroger sur le sens que tout cela prend pour le chercheur lui-même, le sens qu’il donne à sa recherche par rapport à ce que les sujets qu’il interroge en perçoivent eux-mêmes. En interrogeant la musique à travers un large champ de recherche, qui va des théories psychanalytiques au bouclage du temps dans un parcours « proto-narratif » tel que la biologie contemporaine en relève les traces dans le fonctionnement cérébral, Michel Imberty a ouvert un espace considérable à l'interprétation des faits musicaux, et ses écrits interrogent aussi bien le musicologue et l'analyste de la musique que le psychologue ou le philosophe qui s'intéresse à la manière dont l'être humain donne sens à la temporalité. Ce colloque, intitulé « Michel Imberty, la psychologie de la musique au delà des sciences cognitives » se propose d’accueillir les contributions de chercheurs qui ont été à un moment ou à un autre de leur parcours, marqués par cette pensée qui fait entendre le fait musical sous un angle radicalement renouvelé.

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